Le député Vaud Libre et syndic de Crassier Serge Melly interroge le Conseil d’Etat sur les commandement de payer de 1 million chacun envoyés aux municipaux suspendus Michel Agnant et Jérôme Christen. Il s’insurge contre cette mesure extrême d’intimidation et de pression politique de nature à décourager les vocations et demande si les municipaux nommés par le Conseil d’Etat à Vevey ont participé à cette décision. Voici son texte:
Le 20 mai dernier, les municipaux Michel Agnant et Jérôme Christen, actuellement suspendus suite à leur action de donneurs d’alerte dans une affaire impliquant un troisième municipal de Vevey, ont reçu, chacun, un commandement de payer de l million de francs de la Municipalité de cette ville. Ces deux commandements de payer ont été justifiés par la Municipalité comme étant la manière de préserver la ville de ses éventuels droits à des indemnités pour « dégâts d’image ».
Par sa démesure et sa violence, cette méthode transforme un acte juridique en une mesure d’intimidation et de pression politique extrême contre deux édiles qui, à ce jour, ont droit à la pleine présomption d’innocence pour leurs actes de donneurs d’alerte. L’usage d’une mesure juridique, détournée de son but et utilisée hors de toute proportion raisonnable par son montant, est une méthode que l’on croyait réservée aux régimes non démocratiques.
Mesures abusives
Elle est pourtant, hélas, utilisée aujourd’hui dans notre canton, contre deux élus. Ces commandements de payer de l million de francs ont donc été envoyés pour d’hypothétiques prétentions en « dégât d’image », une notion qui en elle-même paraît déjà utilisée abusivement dans le cas de donneurs d’alerte. Par leur excès, ils ont aujourd’hui des conséquences concrètes graves pour les deux personnes qui en sont victimes. Des droits fondamentaux leur sont ainsi quasiment retirés car, de facto, il leur est par exemple aujourd’hui impossible d’emprunter auprès d’une banque ou de signer un bail à loyer,
Cet acte insensé de la Municipalité de Vevey pourrait être considéré comme une affaire purement communale, si le Conseil d’Etat n’était pas intervenu de manière répétée dans la gestion de la crise de la Municipalité de Vevey. Rappelons que c’est le Conseil d’Etat qui a décidé de suspendre le Municipal Lionel Girardin aujourd’hui sous enquête pour des actes qui pourraient être pénaux. C’est toujours le Conseil d’Etat qui a ensuite suspendu les Municipaux Michel Agnant et Jérôme Christen, sous enquête pour avoir agi en donneurs d’alerte. C’est surtout, et encore, le Conseil d’Etat qui a pris la responsabilité importante de nommer deux personnes, représentants d’autres tendances politiques, en remplacement de MM. Agnant et Christen à la Municipalité de Vevey.
Curieuse manière de ramener le calme
Le grand argument du Conseil d’Etat, au travers de la Cheffe du département du DIS, a été de dire que cette mesure devait ramener le calme dans la municipalité et permettre une gestion sereine de l’exécutif veveysan.Le Conseil d’Etat pense-t-il que l’envoi de commandements de payer à hauteur de l million de francs chacun pour d’éventuels « dégâts d’image » est le reflet d’une gestion apaisée ? En tant qu’élu depuis plus de quatre décennies, j’ai vu l’évolution des choses pour celles et ceux qui acceptent le risque et la charge d’être élus dans une Municipalité. Alors qu’autrefois, personne ne songeait à devoir prendre une protection juridique spécifique dans le cadre de nos fonctions, je me suis résolu à en souscrire une, compte tenu des risques juridiques encourus par d’éventuelles actions de citoyens abusives. Le Conseil d’Etat doit-il emboîter le pas à de telles pratiques excessives?
Ce que la Municipalité de Vevey vient de faire, avec l’assentiment actif ou passif de deux remplaçants nommés par le Conseil d’Etat vaudois, est un degré totalement inédit, probablement sans précèdent, dans la remise en cause du mandat politique. Une telle action va décourager de nombreuses personnes à prendre le risque de devenir Municipal. Mais de plus, par l’implication de deux personnes nommées par le Conseil d’Etat, elle peut laisser penser que de tels actes inacceptables le deviennent avec [‘aval tacite du gouvernement.La démarche choisie par le Conseil d’Etat a échoué. En effet, cette dernière n’a pas permis de retrouver un climat serein dans le chef -lieu de la Riviera. Bien au contraire la situation s’est encore péjorée. Bien loin de rétablir le calme, les deux remplaçants municipaux ont manifestement participé à un acte d’une démesure politique inédite pour les institutions politiques vaudoises, toujours largement basées sur [‘engagement personnel, et souvent sur le bénévolat.
Dès lors, je souhaite poser les questions suivantes au Conseil d’Etat:
- Le Conseil d’Etat considère-t-il que l’envoi des deux commandements de payer par la Municipalité de Vevey, dans laquelle siègent deux personnes sur quatre nommées par ce dernier, est de nature à pacifier la situation à Vevey?
- Les deux remplaçants nommés par le Conseil d’Etat pour pacifier la situation, étaient-ils au courant de l’envoi de ces deux commandements de payer?
- Si tel n’est pas le cas, comment justifier que les deux remplaçants soient ainsi écartés d’une telle prise de décision?